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Cette place à part occupe l'essentiel du dernier film d'Eytan Fox, que l'on pourrait définir comme une sitcom engagée et dont la légèreté apparente sert en fait à démasquer les tabous et les hypocrisies de la société israélienne. Le jeu initial devient beaucoup plus sombre lorsque la réalité rattrape le petit groupe, comme une parabole des menaces auxquelles Tel-Aviv pourrait bien, elle aussi, succomber si on n'y prenait garde.
Toutes les critiques de The Bubble
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
- Téléramapar Frédéric Strauss
(...) Eytan Fox garde un regard lucide. Il fait résonner la nostalgie d’un passé pas si lointain où Israéliens et Palestiniens ne vivaient pas dans des « bulles » séparées. Il montre que la frivolité de ses personnages est un masque qui cache des blessures toujours vives, passées ou à venir. Et de leur religion de l’amour, il dit qu’elle est le seul moyen, sous la chape de plomb du conflit, de se sentir vivant, mais pas forcément de le rester.
- Le Mondepar Thomas Sotinel
Mais The Bubble ne se résume pas à cette carte postale à la fois naïve et ironique. Le vrai propos d'Eytan Fox est d'en expliquer la raison d'être et sa fragilité essentielle. Le couple Noam-Ashraf porte la dimension tragique du film, qui peu à peu étend son ombre. Mettre en scène la façon dont l'histoire, la géographie assurent leur primauté sur le désir et les individus n'est pas chose simple. Eytan Fox recourt à la démonstration, une attitude qui n'a pas très bonne presse.Mais il est des démonstrations convaincantes, et The Bubble est de celles-là. Parce que la comédie et ses personnages étaient attachants, la violence de leurs destins (des deux côtés du barrage de Naplouse) apparaît d'autant plus scandaleuse.
- Le JDDpar Barbara Théate
Après "Tu marcheras sur l'eau", Eytan Fox dresse, dans cette Auberge Espagnole à l'israëlienne, le portrait émouvant d'une jeunesse gay et hétéro qui veut changer la donne politique et vivre pleinement sa liberté.
- Pariscopepar Virginie Gaucher
Après « Tu marcheras sur l’eau », « Yossi et jagger », le réalisateur Eytan Fox signe une chronique douce-amère de la jeunesse israélienne, l’opposant, à travers une histoire d’amour impossible, à une réalité de violence et de mort. Une comédie qui vire au noir et dénonce une douce utopie.
- Télé 7 jourspar Julien Barcilon
Sensible et touchante, l'interprétation porte haut son message de paix et de tolérance. Le symbolisme appuyé de l'épilogue ne lui fait heureusement aucun tort.
- Paris Matchpar Christine Haas
Le cinéaste explore d'autres fecettes de la haine en opposant Noam à des colons rigides, en confrontant Ashraf aux membres du Hamas.Il montre aussi la différence d'attitude entre Palestiniens et Israéliens sur l'homosexualité. Mais son talent vient de sa capacité à nouer des liens forts entre ses personnages, même s'ils manquent un peu de profondeur. Des motivations plutôt floues précipitent une fin prévisible. Mais le film existe, et c'est une raison d'être optimiste.
- Fluctuat
Eytan Fox et son compagnon Gal Uchovsky usent d'humour et d'audace pour dresser le portrait d'une jeunesse israélienne qui rêve de paix, raconter une émouvante histoire d'amour interdit, et porter un message politique humaniste. Doté d'un casting sans faille, The Bubble est, malgré son allure légère, une chronique subtile à la fraîcheur réjouissante.
- Exprimez-vous sur le forum The BubblePrix CICAE (Confédération internationale des cinémas d'art et d'essai) et Prix du Public au Festival de Berlin, The Bubble est inspirée de Florentine, sitcom réalisée par Eytan Fox de 1999 à 2000. Les pérégrinations, amoureuses souvent, de la jeunesse branchée de Tel-Aviv sont le prisme choisi par le cinéaste pour filmer sans cliché les espoirs et les blessures de la société israélienne.
Noam, Yali et Lulu, auxquels on s'attache vite, partagent un appartement dans "la bulle", quartier trendy d'une ville tournée vers l'Occident. La jolie Lulu (Daniela Wircer), vendeuse dans une boutique de produits de beauté, n'a pas la langue dans sa poche et venge ses déboires sentimentaux sur les clients. Yali (Alon Friedmann) est gérant de café, gay, un tantinet sarcastique et raisonnablement excentrique. Noam (Ohad Knoller, vu dans Munich) travaille dans un magasin de disques, il rentre d'un séjour obligatoire sous les drapeaux, en poste à un checkpoint. C'est là qu'il a rencontré Ashraf (Yousef Sweid). Celui-ci le rejoint à Tel-Aviv, bouleversant un quotidien rattrapé par la réalité politique et sociale.Eytan Fox, la quarantaine, est né à New York, a grandit à Jérusalem et étudié, après son service militaire, à l'école de cinéma de Tel Aviv. Il partage sa vie et ses films avec Gal Uchovsky, scénariste et producteur, journaliste culturel célèbre, acteur de l'ouverture des médias israéliens dans les années 1980.
Avec Yossi & Jagger (2002) puis le remarqué Tu marcheras sur l'eau (2004), Eytan Fox a montré la difficulté d'être homosexuel, particulièrement pour les militaires, dans une société au sionisme machiste et à l'extrémisme orthodoxe homophobe. En témoignent les troubles causés par le passage de la Gay Pride à Jérusalem (et les ultras tentant tantôt de poignarder les manifestants, tantôt de se faire exploser parmi eux). Le réalisateur considère néanmoins que la société israélienne est tolérante, en partie car la guerre conduirait les parents à accepter un enfant gay, l'essentiel étant qu'il soit en vie.
Côté arabe, la vigueur du tabou est illustrée par la soeur d'Ashraf, qui refuse d'admettre son homosexualité. Un tabou qui a aussi posé des difficultés sur le tournage, quand il a fallu trouver un acteur qui accepte de jouer le père du jeune palestinien.Il est plus facile d'assumer son homosexualité à Tel-Aviv, surtout dans la rue Shenkin. Entre les cafés et boutiques à la mode, il y règne un certain état d'esprit, alter et arty. Uchovsky et Fox vivent eux-mêmes dans cete "bulle" culturelle et chamarrée. Les jeunes sortent, flirtent, vont au théâtre, écoutent de la musique avec une relative insouciance. Ils sont sans complexe, et les dialogues provocateurs sont assez amusants (du caractère "pas très sexy" de l'holocauste à l'aspect "explosif" du sexe). Ils sont loin de l'image d'une société en perpétuelle crise de paranoïa face au terrorisme. Mais parce qu'ils sont plus protégés que les autres des troubles du pays, ils sont accusés d'irresponsabilité. Pour le réalisateur, il ne s'agit que d'un mécanisme de survie. Une volonté d'oubli qui expliquerait par exemple que beaucoup d'Israéliens se réfugient dans la drogue à leur retour du service militaire.
Les personnages de The Bubble, bercés par une pop de bon goût, les chansons de la star et icône gay Ivri Lider notamment, ne sont pas pour autant dénués de conscience politique. Ainsi Lulu et Noam font partie d'un groupe anti-occupation qui organise une rave pour la paix. Et s'ils veulent oublier le conflit qui déchire la région, la réalité les rattrape immanquablement.Les flashbacks à Jérusalem montrent l'absurdité des divisions entre peuples juif et arabe. Ils évoquent aussi le passé du réalisateur, la lutte de sa mère pour préserver la mixité d'un quartier de la ville sainte. Elle appartenait à un groupe de femmes se rendant aux checkpoints pour vérifier que les soldats se comportent respectueusement. Les checkpoints, lieu d'humiliation, sont le quotidien des Palestiniens. Bien que symboliques (avec l'accouchement par exemple), les scènes qui s'y déroulent sont empreintes de réalisme.
Quand Ashraf commence à travailler pour Yali, il doit garder son identité secrète. Sans permis de travail et de peur d'être dénoncé, il est contraint de fuir à Naplouse, où il retrouve sa soeur qui se marie à un chef local du Hamas. Balles perdues en Palestine, attentats en Israël, la guerre revient au premier plan, pour un dénouement dramatique attendu. Mais le réalisateur ne souligne-t-il pas là l'horreur d'une tragédie devenue prévisible et inévitable ?
Optimisme ou désillusion, le film ne tranche pas, comme ces deux peuples sont privés de choix, par des gouvernements militaristes ou par des groupes terroristes. Reste la soif de vie, de plaisir, de bonheur des personnages, dont le coeur recèle un précieux espoir.Si la mise en scène est moins téméraire que le ton, la photographie est réussie, et les décors sont réalistes. Les scènes d'amour sont, homo ou hétéro, sensuelles et délicates. Les portraits sont drôles et sensibles, les interprétations impeccables. Eytan Fox signe un quatrième long-métrage léger et engagé, d'autant plus séduisant que ne sont pas légion, sur le conflit israélo-palestinien, les regards originaux et humains. The Bubble
Un film d'Eytan Fox
Avec Ohad Knoller, Yousef Sweid, Daniela Wircer et Alon Friedmann
Sortie en salles le 4 juillet 2007[Illustrations : © Ad Vitam Distribution]Bande-annonce