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Gueules cachées : les futures stars du cinéma anglais

Les gueules cachées du cinéma anglais

Aujourd'hui, le cinéma anglais est un vivier d'acteurs aux physiques impressionnants et avec de vraies gueules.A l'occasion du Festival du film britannique de Dinard, voilà un trombinoscope des futures stars qui vont faire trembler le cinéma british.<strong>Edouard Sonderborg</strong>Voir aussi<strong>Les films en compétition à Dinard</strong>

Frederick Schmidt

Flic et (surtout) voyou. Dans Les Poings contre les murs (on vous avait prévenus), Frederick Schmidt jouait un maton qu?on ne remarquait pas réellement. Il explose dans Snow in Paradise (présenté à Cannes en mai dernier mais qui sortira en 2015), thriller social dont il est la bombe à retardement. Casté dans la rue par <strong>Andrew Hulme</strong>, le cinéaste, il incarne un <em>lad</em> affuté comme un rasoir, un boxeur raté prêt à tout pour se faire un peu de fric. Un bloc de haine (des riches, des filles, des Arabes et de lui-même) qui ne sait plus où il va ni d?où il vient. C?est lui qui porte le film, c?est sur ses épaules noueuses que repose cette exploration de la virilité, de la violence sociale, du vide spirituel et moral de notre société. Il est le désordre existentiel. Ses muscles secs, sa gueule de serpent et sa façon de marcher comme une petite frappe déglinguée sont le sujet de ce long métrage impressionnant. En le voyant casser des tronches dans les bars, sortir un flingue, sniffer de la coke ou pleurer dans une mosquée, on pense à Tahar Rahim dans <em>Un prophète</em>, voire à <strong>Robert De Niro</strong> dans <em>Taxi Driver</em>.

Jack O'Connell

Les Poings contre les murs (2013) fut (un peu) au cinéma british ce qu?<em>Un prophète</em> avait été pour nous : le révélateur d?une génération d?acteurs qui créèrent un appel d?air, un chambardement esthétique. Depuis presque dix ans, on voyait la tête de Jack O?Connell dans des séries (<em>Skins</em>) ou des films de genre britanniques (Eden Lake, de <strong>James Watkins</strong>, 2008 ; Harry Brown, de <strong>Daniel Barber</strong>, 2011), mais c?est cette « winterbottomerie » carcérale de <strong>David Mackenzie</strong> ? dans laquelle il jouait un détenu hyperviolent ? qui lui offrit définitivement ses galons d?espoir du cinéma. Ce moment où l?on devient « l?inconnu dont tout le monde a déjà marre », pour citer <strong>Jessica Chastain</strong>. Sa présence écrasante et son jeu à fleur de peau faisaient se télescoper les thèmes du sang, de l?appartenance et du destin, tout en lançant une réflexion sur sa différence et sa façon de bouger comme un jeune lion devant la caméra. Nouveau choc prévu le mois prochain avec 71', de Yann Demange, dans lequel il réussit à rendre bouleversant un soldat paumé dans un conflit irlandais qui n?a plus de sens. Victime et moteur de ce <em>shoot?em up</em> sur grand écran, l?acteur conserve sa crédibilité dans l?action tout en transmettant une forte dose d?émotion. Résultat : il vient de décrocher son passeport hollywoodien puisqu?il sera bientôt au générique d?Invincible, d?Angelina Jolie.

Liam Walpole

On va beaucoup parler de <em>The Goob</em>, de Guy Myhill, qui sera présenté au festival de Dinard. Moins pour sa mise en scène (du cinéma réaliste à l?anglaise) que pour Liam Walpole qui, à l?occasion de son premier film, tient le rôle principal et naît au cinéma. Le film débute sur un conseil (« Casse-toi de cet endroit de merde »), lancé par un chauffeur de bus au héros. C?est le dernier jour de classe de l?année et « The Goob » (le surnom du personnage) n?a plus ni fringues ni identité, et surtout aucune envie de suivre cette recommandation. Son visage empreint d?une innocence lumineuse, ses traits de chérubin anglais ne semblent pas taillés pour le monde de cynisme et de violence malsaine qui l?attend. Le regard triste mais les armes à la main : c?est sur ce contraste que joue le film, tourné au plus près du visage lisse de l?acteur, de sa silhouette sèche. Walpole est un corps qui cache un personnage.

Conor McCarron

C?est dans Neds (2011), l?autofiction de Peter Mullan, que Conor McCarron nous est apparu pour la première fois. Débuts fracassants : il entrait dans le film tel un gamin timide, brillant et malhabile, avant d?entamer sa métamorphose en punk ultraviolent et en monstre du cinéma. L?enjeu du film ? La déconstruction de son rôle. Petit à petit, John McGill enlevait son armure (le savoir, l?humour et le vernis social d?un enfant surdoué) pour se transformer en bête sauvage, sa bouille d?ado peu à peu fracassée par la lutte des classes et les humiliations infligées par ses camarades. Au lieu de le jouer impassible, il préférait mettre en avant ses fêlures et des stries d?intelligence parasitant son désir de vengeance sociale. Derrière sa rondeur rousse faisant penser à un Depardieu des Highlands, au-delà du mutisme troublant perçait la violence libertaire. Depuis, on était sans nouvelles de lui, mais il revient cette année dans Catch Me Daddy, de Daniel Wolfe, grosse sensation indé qui devrait secouer à Dinard.

Joe Cole

Une tête de chanteur de boys band, 25 ans et un nom de footballeur anglais (« J?aurais pu prendre le nom de ma mère, mais Joe Quest, ça faisait star du porno ») pour une filmo qui ressemble à un casier judiciaire. Cole a débuté sa carrière comme violeur dans la série The Bill, a poursuivi avec toutes sortes de délits dans les séries Skins ou The Hour, décroché le rôle principal du <em>revenge drama</em> <em>Offender</em> (Ron Scalpello, 2012), pour ensuite jouer le benjamin du gang Shelby dans la série Peaky Blinders (le <em>Boardwalk Empire</em> anglais). Son secret ? « Un cursus scolaire foiré, des métiers pourris (vendeur de tapis, barman) et cette frustration, cette rage qui s?accumulaient et dont j?ai décidé de me servir. » Elles explosent à l?écran. Avec sa gueule d?angelot pervers et son physique de Pet Shop Boys cocaïné, Joe Cole inspire un sentiment de terreur et de fascination. Son sens du bizarre, sa dégaine tordue et ses rôles (des <em>« baby faced assassins »</em>, analyse-t-il) en font l?un des acteurs les plus étranges et les plus flippants du moment.

Aujourd'hui, le cinéma anglais est un vivier d'acteurs aux physiques impressionnants et avec de vraies gueules.A l'occasion du Festival du film britannique de Dinard, voilà un trombinoscope des futures stars qui vont faire trembler le cinéma british.Edouard SonderborgVoir aussiLes films en compétition à Dinard