- Fluctuat
Grâce la finesse du jeu des acteurs et ses changements de cap permanents, Quand j'étais chanteur réussit là où Podium et Jean-Philippe échouaient. Une excellente surprise.
- Quand j'étais chanteur en images : la galerie photos
- vos impressions ? discutez du film Quand j'étais chanteur sur le forum cinémaDu cadre, dans son énumération laconique (discothèque locale, bars, thés dansants, ...etc., dans une ville de province), on pressent le coté ringard. Du héros, Alain Moreau (et son orchestre), star de Clermont-Ferrand, idem. Pourtant, le réalisateur ne se moque jamais de ce monde où des célibataires de 40 ans et plus espèrent des rencontres. Ce sont des vies, comme les autres, où la solitude est le pire ennemi. Seule, Cécile de France, fraîchement séparée, avec un jeune enfant, l'est tout autant qu'Alain (Gérard Depardieu), chanteur de bal qui vit avec...une chèvre. Leur rencontre, improbable, fonctionne grâce aux charmes des deux acteurs. L'excellente idée est de les faire coucher ensemble dès les premières minutes. Ainsi débarrassé de la question qui aurait immanquablement accompagné son « couple », Xavier Giannoli peut les laisser se chercher, se fuir doucement, jouer ensemble, sans se focaliser sur un éventuel dénouement...puisqu'il a déjà eu lieu. La perspective de leur relation en est changée.Entre les deux, une évidente séduction circule et légitime leur attirance. Leur humanité éclate dans l'expression de leur manque de confiance, dans ces inhibitions que l'on ne fait que deviner. Un vrai rapport de charme habite alors l'écran et suffit déjà à emporter l'adhésion. A distance raisonnable, la caméra respecte leur intimité mais reste prompt à saisir les moindres variations, tels d'infimes changement d'intonations, fêlures de voix ou battement de sourcils, comme autant d'indices de ce que dissimule le vernis de leur pudeur respective. Dans des lieux vides propices à la parole, arrêtés dans l'encadrement des portes comme s'ils craignaient de rentrer avec effraction dans la vie de l'autre, ils s'apprivoisent, entre délicatesse et incompréhensions. Peu à peu se dessinent deux jolies figures, un peu hors-jeu, qui gagnent, grâce à leurs incertitudes et leur lucidité, en charme et en épaisseur.Appuyé par le regard juste et dépourvu de condescendance que le réalisateur pose sur eux et les lieux qu'ils traversent, un style, humain et tendre, s'impose sans heurts. Cette province est un petit monde où l'on se croise facilement, sans même s'y chercher. Une sorte d'éternel retour (...des mêmes rengaines, des mêmes pistes de danse, des mêmes visages, des mêmes motifs), dépourvu de toute tristesse, qui a sa raison d'être et se trouve irradié par le charme des gens qui la peuplent. Ainsi, la recherche d'un contrat, les petits problèmes de santé qui empêchent de chanter les « bons jours » (c'est-à-dire le week-end), sont autant de petites choses simples, peu spectaculaires et profondément ancrés dans la réalité, qui jalonnent le film et contribue à rendre ces existences attachantes.Mais comment fonctionne ce petit miracle ? Pourquoi suit-on avec autant de plaisir ces deux personnages, alors qu'il se passe si peu de chose ? Peut-être simplement parce qu'Alain est chanteur de bal et qu'il puisse dans le patrimoine des chansons de variétés. Elles sont l'expression, dans une forme simple et universelle, de sentiments que chacun a pu expérimenter. On peut s'en moquer mais leur puissance d'évocation reste forte. Elles fonctionnent un peu à l'image d'un cliché : parfois ridicule et facile d'apparence, mais forcément un peu vraie. Cette utilisation du cliché est d'ailleurs présente tout au long du film. Il y joue le rôle d'un leurre pour attirer le spectateur en terrain de connaissance, lui faire baisser sa garde et finalement le surprendre. Pas de bruits, ni de fureur donc, aucune esbrouffe dans cette histoire simple. Elle nous séduit et nous amène sur son terrain : celui de l'émotion, forte et partagée, qui trouve sa source dans le patrimoine commun de la chanson de variétés.Quand j'étais chanteur
Un film de Xavier Giannoli
Avec Gérard Depardieu, Cécile de France, Mathieu Amalric
Sortie en France : 13 Septembre 2006
[illustrations © Stéphanie Di Giusto]
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Quand J'Étais Chanteur