Masterclass James Cameron
Anthéa Claux

Face à un public fervent, le cinéaste a parlé d'imaginaire, d'intelligence artificielle et d'Arnold Schwarzenegger. On était là.

L’exposition temporaire "L’art de James Cameron" a ouvert ses portes le 4 avril 2024 à la Cinémathèque française, à Paris, où elle se tiendra jusqu'au 5 janvier 2025. En parallèle, une rétrospective intégrale propose de redécouvrir sur grand écran les oeuvres du cinéaste jusqu’au 26 mai prochain.

Elle a démarré ce jeudi avec Terminator, le "premier" long-métrage reconnu par Cameron (ne lui parlez pas de Piranha 2), qui souffle ses quarante bougies cette année. Le film a beau être sorti en 1984, il n'a pas pris une ride – ou presque. Terminator a permis à Cameron de rentrer dans la cour des grands et d’imposer son style dans l’industrie – celui d’un cinéaste visionnaire passionné par la technologie, l’imaginaire et les abysses, repoussant sans cesse les limites de l’inconnu.

Arnold Schwarzenegger dans Terminator en 1984
Fox

"I’ll be back", "Je suis le roi du monde"... tant de références de la pop culture sont nées à travers l'esprit et la caméra de James Cameron. Connu et récompensé pour Alien : le retour, Titanic, Avatar et tant d’autres, le réalisateur canadien a partagé ses anecdotes avec les spectateurs privilégiés qui ont bataillé pour obtenir un précieux ticket d’entrée

Accueilli en rock star sous un tonnerre d’applaudissements, Cameron a salué son public ("c’est la plus longue standing-ovation que j’ai jamais eu !") Il s’est installé et la séquence a commencé. Voici 5 informations à retenir de cette masterclass.

Masterclass James Cameron
Anthéa Claux

"Arnold n’était plus Conan le Barbare, il était le Terminator."

La vérité a été rétablie. Lorsque l’on a demandé à James Cameron de revenir sur sa rencontre avec Arnold Schwarzenegger, le réalisateur a d'abord expliqué que cette histoire avait été mal racontée par l’acteur, qui affirme que c'est lui qui a eu l'idée de jouer le Terminator. Schwarzy devait effectivement incarner l’autre personnage masculin, Kyle Reese (Michael Biehn). Mais c'est Cameron qui a changé d'avis, ne parvenant pas à voir Arnold dans un rôle aussi verbal. L’acteur austro-américain dégageait au contraire une présence physique si impressionnante qu’il ne pouvait être que le Terminator.

"Arnold ne me donnait pas l’impression d’être un personnage avec autant de texte. Il avait plutôt une présence physique. Au déjeuner, alors qu’il parlait, je le regardais manger et je me disais qu’il avait un visage si particulier qu’il pouvait jouer le Terminator."

Arnold, intéressé par le script, a donc signé et sept mois plus tard il a rejoint le tournage de Terminator. La première scène qu’il a filmé était la course poursuite dans le parking sous-terrain. James Cameron lui donne quelques directives ("je veux que tu sois comme un requin") et réalise qu'il a fait le bon choix :  

"C’est à ce moment-là qu’on a su qu’on tenait notre film car on avait notre personnage. Arnold n’était plus Conan le barbare, il était le Terminator."

terminator
Copyright Columbia TriStar Films

Lorsqu'il écrit la suite, 7 ans plus tard, James Cameron a en tête de surprendre les spectateurs en faisant du Terminator un héros : "Laissons le public pleurer pour un Terminator." Heureux de son scénario, il le présente à Arnold Schwarzenegger qui ne semblait pas en être tout aussi ravi.

"Il m’a dit ‘Jim, je ne sais pas trop quoi penser du script. Je suis le Terminator et je ne tue personne.’ Alors j’ai répondu ‘Les spectateurs ne verront rien venir. C’est ça la surprise.’ Il a dit ‘Mais moi je suis le type qui fracasse la porte et tire sur tout le monde. C’est ça mon personnage.’ J’ai continué ‘Oui, mais on va aller au-delà de ça.’ Arnold insiste ‘John me dit que je ne peux tuer personne qu’à partir de la page 36, mais donc avant je peux tuer des gens ?’ J’ai conclu ‘Oui mais là tu ne tues personnes, c’est toi le héros’. Arnold a fini par dire ‘Bon d’accord’."

"C’est elle qui a rendu la reine dans Alien vivante."

Cameron a aussi beaucoup collaboré avec Sigourney Weaver, qu’il admire depuis Alien de Ridley Scott sorti en 1979. Il a rendu hommage à sa performance dans la suite qu'il a dirigée, et a encore une fois clamé son admiration pour elle en discutant avec la réalisatrice Alice Winocour (Proxima), invitée de cette masterclass.

"C’est elle qui a rendu la reine vivante dans Alien. C’est grâce à sa conviction et son impression qu’elle l’a voyait vraiment alors qu’il n’y avait bien souvent rien devant elle ou alors juste une marionnette."

alien 2
20th Century Studios

Nommée pour cette performance aux Oscars, cas rare pour un film d’horreur, elle représente pour lui un personnage féminin fort dont l’archétype se retrouve dans Sarah Connor, héroïne malgré elle de Terminator.

"Nous vivons dans un monde où la science-fiction est réelle"

On retrouve dans le cinéma de Cameron cette interrogation sur notre rapport à la technologie et notamment l’intelligence artificielle. Le réalisateur explique que s’il ne réinvente pas la roue et s’inspire des oeuvres de science-fiction qui ont marqué sa jeunesse (notamment 2001 l’Odyssée de l’espace), son enfance dans la guerre froide y est aussi pour quelque chose. "A l’époque où j’ai fait Terminator, on avait 30 000 ogives nucléaires. C’était une période très dangereuse dans l’histoire de l’humanité."

Ses inquiétudes et son pessimisme sur l’espèce humaine n'ont changé avec le temps :

"Je crois que ce qui m’inquiète le plus c’est que chaque technologie crée par l’Homme a été utilisée comme une arme contre les Hommes. Et aujourd’hui le problème avec l’écriture de science-fiction, c’est qu’on vit dans un monde où la science-fiction est réelle. L’IA n’est plus un futur plus ou moins lointain, ça se passe en ce moment même."

Un illustrateur rêveur avant d’être un réalisateur

D'où vient l'inspiration de James Cameron ? Tout simplement de ses rêves. Ce que l’on voit à l’écran vient de son imagination – il l’a rêvé. "Le Terminator me vient d’un rêve. La beauté d’Avatar vient d’un rêve – un rêve bien particulier quand j’étais plus jeune." James Cameron a-t-il peur de ses propres rêves ? Non, sa plus grande peur est de ne plus rêver. Pas de panique, ça ne lui est jamais arrivé !

exposition l'art de james cameron
Anthéa Claux

"Les rêves sont toujours à double tranchant. J’ai peur de ne plus rêver, ce qui ne m'est jamais arrivé. Mais en ce qui concerne les cauchemars, je suis toujours partant pour ! Mais j’aime aussi les beaux rêves. J’ai fait une fois un rêve qui m’a tellement marqué que j’ai dû le dessiner en me réveillant. J’avais 19 ans. Cela m’a inspiré pour Avatar que j’ai fait 30 ans plus tard. Alors je n’attends qu’une chose à chaque fois, c’est m’endormir pour pouvoir rêver."

Avatar, ça arrive

Cameron a tenu à rassurer le public en rappelant qu'Avatar 3 sortirait bien l’année prochaine et qu’il restait encore un an et demie de préparation. Il a aussi ajouté que les scripts des quatrième et le cinquième films étaient déjà écrits. Les dessins préliminaires sont presque terminés et la modélisation va pouvoir commencer. La machine est donc bien en route.

Pour finir, en remerciement pour ses loyaux services rendus au cinéma, Cameron s’est vu offrir à la fin de cette masterclass une plaque à son nom dont une copie sera fixée derrière l’un des sièges de la salle de projection – aux côtés de grands noms comme Martin Scorsese. James Cameron rejoint un cercle privilégié de cinéastes inscrits désormais dans le patrimoine de la Cinémathèque française.

Masterclass James Cameron
Anthéa Claux

A lire aussi sur Première

Première - Hors-série n°20 : James Cameron en 50 moments cultes

Analyse des scènes clés d'Avatar, Titanic, Terminator et sa suite, Aliens ou True Lies, mais aussi de ses productions et/ou scénarios (Alita Battle Angel, Rambo II...).