Gods of Egypt
SND

Gods of Egypt revient ce soir sur NRJ12 (à 21h05), une bonne occasion de réévaluer le délire de fantasy égyptienne du réalisateur de Dark City qui s’est fait étriller pour sa sortie salle.

Oubliez vos livres d'histoire : les dieux égyptiens sont des humanoïdes de trois mètres de haut au sang doré, doués de super-pouvoirs et capables de se transformer en monstres de métal façon Chevaliers du Zodiaque quand on les énerve. L'Egypte de Gods of Egypt porte évidemment la marque de son brillant réalisateur, Alex Proyas. Clipper visionnaire de l’écurie Propaganda (dont sont également sortis Fincher et Antoine Fuqua), Proyas est surtout connu pour avoir mis en boîte The Crow et Dark City, un styliste dont l’univers doit plus à la science-fiction 70s qu'à Christiane Desroches Noblecourt. Pas étonnant que le cinéaste semble recycler dans Gods of Egypt la vision psychédélique de son projet abandonné Paradise Lost. Proyas a longtemps travaillé sur cette adaptation du poème épique de John Milton racontant la chute de Lucifer avant que la Warner ne le lâche début 2012 pour des questions de budget. 

« Lost » ? Pas tout à fait car tout est là : le tout-numérique, le mélange entre l’esthétique manga et les visions romantiques et infernales. L’ennui, c’est que cet imaginaire délirant n'a pas su séduire le public. Gods of Egypt a été accusé de tous les maux, mais une critique revenait régulièrement. On reprochait à Proyas d'avoir « blanchi » ses personnages en faisant jouer des dieux égyptiens par, entre autres, un Ecossais (Gerard Butler) et un Danois (Nikolaj Coster-Waldau de Game of Thrones). Un cas typique de blanchiment, de « whitewashing », l'insulte suprême aux Etats-Unis. Et ce débat aurait tué la sortie du film. Lionsgate et Alex Proyas furent contraints de s'excuser publiquement (« on doit refléter la diversité de notre public. On doit pouvoir faire mieux. ») avant que le réalisateur ne parte finalement en guerre contre les critiques qui avaient dit du mal du film.

Le réalisateur de Gods of Egypt dit que les critiques de film sont "des crétins tarés"

Fiction métisse

« C'est un pur film de fantasy, une fiction ! Pas un documentaire » relativise Claude Aziza, latiniste et éminent spécialiste du péplum. « On ne sait pas du tout à quoi ressemblaient vraiment les Egyptiens de l'Antiquité et les historiens se posent encore la question. Alors leurs dieux, des créatures par définition imaginaires? Encore moins ! » Et le casting, Claude ? « C’est malin : engager Gerard Butler, c'est engager le Léonidas de 300 et espérer toucher le même public ». Même si le whitewashing reste un problème structurel hollywoodien (les cadres des studios pensent que certains films s'adressent à un public blanc et doivent donc comporter des acteurs blancs), notre observateur nous encourage à dépasser ce débat pour réévaluer le film. Et peut-être le voir pour ce qu’il est : un péplum inclassable et inégal. Un de ces films hybrides, inspirés par les comics, comme 300 ou Immortels, et qui montrent un imaginaire bien plus métisse que ses acteurs.