Toutes les critiques de Débâcle

Les critiques de Première

  1. Première
    par Thierry Chèze

    Il y a devant et comme ici derrière la caméra une constante chez Veerle Baetens : son peu d’appétence pour la tiédeur et son goût pour les histoires rugueuses aux passions exacerbées qu’elles soient rentrées ou explosives. L’héroïne du déchirant Alabama Monroe a choisi comme entame de sa carrière de réalisatrice d’adapter un roman de Lize Spit, le récit d’un traumatisme vécu gamine par Eva, qui, longtemps enfoui en elle, va ressurgir vingt ans plus tard avec le besoin irrépressible de solder les comptes de sa souffrance. Il en va de Débâcle comme du récent Un silence de Lafosse : en révéler trop serait aller contre l’expérience malaisante – mais jamais complaisante – que fait vivre ce récit, sans pour autant qu’il ne soit construit comme un suspense. Veerle Baetens excelle à filmer l’enfance dans ce qu’elle a de plus cruel mais aussi ces parents qui préfèrent détourner le regard plutôt que d’assumer les conséquences des actes de leurs gamins. Débâcle parle avec la même acuité de la perte violente de l’innocence que du temps long nécessaire à en prendre conscience. Veerle Baetens filme toujours à bonne distance et aves des choix de cadre pertinents la violence morale et physique ici distillée, ne détournant jamais hypocritement le regard. Comme pour soutenir sa jeune héroïne, lui dire qu’elle n’est pas seule et souligner que ses agresseurs n’ont pu évacuer de tels actes de leur mémoire. Et Rosa Marchant et Charlotte de Bruyne  - qui jouent respectivement Eva enfant et adulte - forcent l’admiration par la profondeur et la puissance de leur interprétation