Avant de réaliser Ni le ciel ni la terre Clément Cogitore tournait des documentaires, et c'est probablement de cette expérience qu'il s'est servi pour représenter un avant poste militaire en Afghanistan avec tant de réalisme qu'on s'y croirait, depuis l'agencement strictement règlementaire du camp, jusqu'à l'organistaion des patrouilles, en passant par les biscottos saillants des soldats qui soulèvent de la fonte pour tuer l'ennui dans cette espèce de prison en plein air. On est en plein réel, jusqu'à ce que l'histoire nous entraîne sans en avoir l'air dans une réflexion captivante sur la nécessité de se raconter des histoires, en frôlant au passage des registres inattendus comme le fantastique ou le surnaturel.Au départ, des soldats vivent au quotidien leur condition d'occupants chargés de maintenir l'ordre. Ils ont établi des règles, et une sorte de statu quo s'est instauré entre eux, les habitants du village voisin, et les talibans prudemment installés de l'autre côté de la frontière. Les patrouiles, les embuscades et les visites chez les villageois peu coopératifs font partie d'une routine qui est perturbée lorsqu'une série de disparitions alarme le capitaine français (Jérémie Rénier, très bien). Bientôt, il est clair que le phénomène dépasse le cadre de la guerre puisqu'il qu'il touche indistinctement les Français, les villageois ou les Talibans, et même les animaux.Un espoir d'explication arrive à travers le récit d'une enfant selon laquelle les disparitions ont eu lieu dans une zone sacrée. Mais dans la réalité, le capitaine va devoir rendre des comptes à l'armée et aux familles. C'est là où le film prend toute sa dimension, en montrant que lorsque la raison fait défaut, il faut bien trouver un moyen de justifier l'inexplicable. Les mensonges nécessaires qui en découlent sont à la base des mythes, des légendes et des histoires que l'humanité a inventées depuis l'aube des temps, et dont le cinéma n'est qu'un des instruments.Le thème est extrêmement puissant, et Clément Cogitore le raconte avec une maîtrise technique très impressionnante pour un premier film.  Gérard DelormeNi le ciel ni la terre de Clément Cogitore avec Jérémie Rénier, Kevin Azaïs, Swann Arlaud est présenté à la Semaine de la critique à Cannes.