Première : Ce qui démarque votre Maniac du film de Lustig est incontestablement la vue subjective. Comment vous est venue cette idée ? Alexandre Aja : C'est d'abord plusieurs longs-métrages en vue subjective qui m'ont donné cette envie et pas forcément des films d'horreur, de La femme défendue avec Isabelle Carré à Enter The Void de Gaspard Noé. Alors quand Maniac s'est imposé à nous, nous nous sommes demandés Franck Khalfoun et moi, si nous devions faire quelque chose de plus classique ou si nous devions tendre vers cette vue subjective...En même temps, cette vue subjective était le moyen de trancher avec la version de William Lustig ? Oui complètement. C'était bien entendu une manière de se démarquer de l'original mais aussi un moyen de prouver qu'il fallait un remake de Maniac. Vous savez, l'original est un classique et les amoureux du genre y sont attachés. C'était un vrai challenge et sûrement, un des tournages les plus stimulants de ma vie.Vous avez décidé de changer le décor du film en plaçant votre Maniac à Los Angeles alors que le premier se déroulait à New-York. Pourquoi cette prise de risque ? Je vis aux Etats-Unis et je connais bien le pays. Le New-York d'aujourd'hui n'a plus rien à voir avec la ville dépeinte dans le Maniac de Lustig. Par contre, Los Angeles Downtown est un peu comme cela. C'est sale, dangereux, ça sent la pisse. Vraiment ! La faune est étrange une fois la nuit tombée... Au final, le Los Angeles actuel ressemblait plus à l'image dont on avait besoin pour illustrer cette inquiétude permanente. La ville s'est imposée à Franck et moi dès que l'écriture du scénario a été terminée.Un autre élément qui semble s'être imposé à vous : Elijah Wood dans le rôle du Maniac. Comment avez-vous pensé à lui alors qu'il est tellement différent de Joe Spinell ? On voulait plus une sorte de Norman Bates qu'un personnage se rapprochant du Maniac original. Elijah Wood a cette candeur et cette fraîcheur qui lui permet de tout jouer. Mais c'est vrai qu'un film d'horreur, même lui était sceptique... D'ailleurs quand on lui a proposé, il n'a pas compris ! Mais je pense que le résultat est tout simplement bluffant grâce à son travail acharné. Il était tous les jours, du matin au soir, sur le plateau de tournage. Vous verrez il est impressionnant.Votre désir de faire un remake est-il venu du fait que vous vouliez traiter les zones d'ombre laissées par l'original ? Exactement. Le fétichisme des mannequins dans l'original n'était pas traité. Dans ce remake, nous avons développé les traumatismes d'enfance et les angoisses du tueur. Au final, on le comprend mieux et on a de l'empathie pour lui. On dépasse bien souvent le fait que ça soit un monstre car il a des peurs universelles comme ne pas être aimé, être abandonné... Elijah Wood a enrichi le personnage de manière troublante.On ressent de la passion dans vos propos. Regrettez-vous de ne pas avoir réalisé Maniac ?C'était un problème de calendrier mais non je ne regrette rien. J'aime réaliser mais aussi produire. Mais ce qui est certain c'est que je n'abandonnerai jamais aucune des deux activités. Je viens de finir un film et je suis actuellement sur un gros projet, l'adaptation de Cobra (un budget de 120 millions de dollars, ndlr). Vous voyez, je tiens à mes deux casquettes.Propos recueillis par Anthony Verdot-Belaval