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D’une sobriété à faire passer les interprètes de Bresson pour Michaël Youn, l’acteur Nicolas Abraham le transforme presque en effet spécial : l’homme-vitre, mieux qu’à Hollywood. Mais, à force d’obstination secrète (« Je me prépare », répète-t-il face aux années qui défi lent), de rituels tranquillement psychotiques (apprendre des langues étrangères, remplir une valise) et de résignation crève-coeur (l’amour de sa vie lui passe sous le nez), il va pourtant devenir un des plus beaux personnages de l’année. D’ellipses en trouvailles aussi narquoises que déchirantes jusqu’à l’apothéose poétique de l’épilogue, Frédéric Pelle nous murmure ainsi à son tour que pour qu’un film soit intéressant, il suffit parfois d’oser le découvrir.
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Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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La réalisation est très soignée et l'univers de Frédéric Pelle n'est pas sans rappeler celui de Kaurismaki pour son économie de dialogues et son austérité. Un soin tout particulier est apporté à la bande sonore très cosmopolite du film qui permet au spectateur de pénétrer l'univers onirique de ce personnage rêvasseur.
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Entre fantaisie mélancolique et naufrage existentiel, cette comédie est adaptée d'un roman de Laurent Graff, Voyage, voyages, parue aux éditions du Dilettante.
Il y a quelque chose d'attachant dans la dérive de ce quidam qui, passant sa vie dans une bulle, passe à côté de sa vie. Hormis l'épisode plus incarné de l'amante thaïlandaise, Frédéric Pelle peine un peu à imposer son ton.
Le registre est celui de Tati ou d'Etaix, mais le personnage minimaliste est si décalé du réel que ses aventures inspirent une sympathie distraite.
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Joli premier film, qui pallie son manque de moyens par un art de croquer ses personnages, dans toute leur poignante banalité. Tendre et juste.
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Histoire d'une vie entière figée dans l'élan, ce film délicat et son héros singulier (Nicolas Abraham, discrètement lunaire) approfondissent, mine de rien, la vertigineuse question du possible : tant que rien n'est vécu, tout reste à vivre. Cette idée enivre et empoisonne Patrick, comme un opium paralysant. Obsédé d'« ailleurs », d'« après », il conjure la mort à sa manière, comme il se vaccine, encore et encore, contre toutes les maladies du bout du monde. Mais, bien sûr, aucun vaccin ne prémunit contre le temps qui passe, aucune inertie - même choisie - n'empêche de vieillir... Ancré dans un décor délibérément monotone, dans une lumière sourde de fin de saison, ce petit conte philosophique flotte entre mélancolie et dérision poétique. Seule couleur vive, la valise posée, inutile et fascinante, dans un coin d'appartement : elle est d'un beau rouge éclatant, comme un sens interdit.