Hunters d'Amazon
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Au cœur du contentieux, la scène du jeu d'échecs humain, inventé par les scénaristes.

Hunters propose une approche unique et intéressante du devoir de mémoire, à travers une chasse aux Nazis menée par les survivants des camps de la mort. Située dans les années 1970 en Amérique, la série s'autorise de nombreux flashbacks, pour raconter la Shoah et la vie dans les camps, au coeur de la Seconde Guerre mondiale. Des moments, forts, durs, qui se déroulent en grande partie du côté d'Auschwitz. On y voit la brutalité et la cruauté avec lesquelles étaient traités les prisonniers juifs. Sauf que Hunters ose sortir du cadre réaliste, et extrapole l'horreur des camps, en rajoutant des éléments qui n'ont pas réellement eu lieu. Notamment une scène de jeu d'échecs humain absolument terrifiante, qui n'a pas plu aux administrateurs du musée commémoratif d'Auschwitz, qui perpétuent aujourd'hui la mémoire des 1,1 million de personnes tuées ici pendant l'Holocauste.

"Auschwitz a été rempli d'horribles souffrances documentées dans les récits des survivants. Inventer un faux jeu d'échecs humain pour Hunters n'est pas seulement une folie et une caricature dangereuses. Cela permettra de nourrir les futurs négationnistes. Nous honorons les victimes en préservant l'exactitude des faits", a écrit le musée sur son Twitter officiel. Et à ceux qui rétorque que la fiction peut se permettre de modifier l'exactitude des faits, les administrateurs d'Auschwitz répondent : "En d'autres termes, vous dites qu'un film peut mentir sur la réalité car ce n'est qu'un film. Nous sommes absolument en désaccord. Cela est irrespectueux et dangereux." Et de conclure que la série aurait dû "inventer un camp n'ayant pas existé. Si vous utilisez cependant un lieu réel, respectez son histoire et la souffrance de ses victimes."

Face à ces critiques, le créateur de la série, David Weil, a publié une déclaration puissante détaillant les liens de sa propre famille avec Auschwitz et sa visite dans ce qui reste du camp, qui, selon lui, a eu un impact significatif sur son travail :

"Il y a des années, je me suis rendu à Auschwitz et j'ai vu les portes que ma grand-mère avait dû franchir des décennies plus tôt et la caserne dans laquelle elle avait été forcée de vivre en tant que prisonnière. J'ai vu des vestiges du monde cauchemardesque auquel elle avait survécu. Ce fut une expérience qui a changé à jamais le cours de ma vie. J'ai cherché à faire ma part du devoir de mémoire - aussi grande ou petite soit-elle - pour assurer la promesse de «Plus jamais revivre ça». Je crois toujours avoir une responsabilité en tant que petit-fils de survivants de l'Holocauste, celle de garder leurs histoires vivantes. Pour parler spécifiquement de la scène du "jeu d'échecs", c'est un événement fictif. Pourquoi ai-je senti que cette scène était importante pour le scénario ? Pour contrer plus puissamment le récit révisionniste qui blanchit la perpétration nazie, en présentant le sadisme et la violence les plus extrêmes - et les plus véridiques sur le plan de la représentation - que les nazis ont perpétrés contre les Juifs et d'autres victimes. Et pourquoi ai-je ressenti le besoin de créer un événement fictif alors qu'il y avait tant de vraies horreurs qui existaient ? Après tout, il est vrai que les nazis ont commis des actes de sadisme et de torture généralisés extrêmes - et même des «jeux» cruels - contre leurs victimes. Je ne voulais tout simplement pas dépeindre ces véritables actes de traumatisme."

Le créateur de Hunters conclut : "Je suis éternellement reconnaissant au Mémorial d'Auschwitz pour tout le travail important et vital qu'ils font, pour garder en vie la mémoire des victimes et des survivants comme ma grand-mère, Sara Weil. Je pense que nous sommes très largement du même côté et que nous travaillons vers les mêmes objectifs."