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Cinéma français cherche carton populaire. Depuis le succès monstre d’Intouchables (on ne va pas ressortir les chiffres, vous les avez tous en tête, sinon, c’est ici), tous les radars sont en alerte. Quel sera le prochain succès populaire français ? Le film qui réussira à faire sauter la banque et à mettre tout le monde d’accord ? Depuis quelques semaines, le milieu du cinoche tricolore cherche sa nouvelle pépite. Quelques noms circulent déjà : on espère beaucoup des Seigneurs de Dahan, avec son casting aux tronches improbables, et le Astérix de Laurent Tirard est attendu au tournant. Mais, dans le lot et à ce petit jeu, un film a peut-être pris une longueur d’avance : Radiostars, de Romain Levy. Premier long d’un scénariste de comédie déconne (Cyprien et les 11 Commandements, notamment), Radiostars raconte le quotidien d’une équipe d’animateurs radio officiant pour une matinale (pensez NRJ). Lorsque les audiences plongent, la station impose à l’équipe un road trip pour renouer avec son public et l’envoie donc sillonner la France profonde. Un film de pote doublé d’un choc improbable : le Morning contre le 13h de Pernaut. Bande-son parfaite, casting impeccable, dialogues de dingues… On peut déjà prédire le phénomène. Fédérateur ? A mort ! Calibré pour plaire ? Même pas : l’écriture gonzo, les blagues bien graves, les raps qui tâchent de Jacky Ido... Tout ça sent l’authentique à plein nez. C’est la force du film, mais pas la seule.Génération XRadiostars fonctionne à plein tube parce qu’il est d’abord le produit de sa génération : un film de potes traversé par des questions ultra-contemporaines (la France urbaine vs la France rurale, le choc des cultures...) qui a le bon goût de ne pas chercher à imposer sa thèse. Comme Tout ce qui brille, Radiostars est plutôt un film éponge : ça se passe dans la France 2012, celle de la crise, du cynisme et de la fin des illusions. Mais ce que les héros ont à revendre, c’est du désir, une tchatche monumentale et des vannes au kilo. En descendance croisée de Mes meilleurs copains et de Tout ce qui brille (version mec), Radiostars est un joyeux bordel qui raconte un bout de France et de jeunesse d’aujourd’hui. Mixte. Travaillée par les dilemmes. N’ayant pas peur des (gros) mots, des coups de gueule et des vérités qui fâchent. Comme les derniers cartons populaires apparus sur les écrans... Ajoutez à cela l’une des meilleures bandes-son entendues dans un film français et vous obtenez de quoi affoler tous les radars pop culturels.Big FoutoirLe film est aussi l’occasion de découvrir de nouvelles gueules, de nouveaux talents. Pour son premier long, Romain Levy a su caster une équipe de comédiens parfaite et créer une osmose hallucinante. Dans la peau du manager fort en gueule, Cornillac tient sans doute le rôle qui lui manquait : le leader affectueux et bourru, capable de passer du coup de boule à l’éclat de rire en 30 secondes ; Douglas Attal, la belle gueule revenu de tout, est parfait ; Jacky Ido croisé chez Tarantino, n’a que quelques scènes mais vole le film quand il rappe ; Et puis, il y a l’atout Manu Payet, second rôle qui explose tout. Oubliez le comique télé (ou radio, où il a commencé) aux vannes faciles, Payet s’offre ici un rôle sur mesure qui lui permet de montrer son improbable sens du timing, de la tchatche et de l’émotion. Sans exagérer, c’est la même révélation qu’Omar dans Intouchables : pas une performance, mais une métamorphose, une apparition. Radiostars lui doit beaucoup.La Grosse boule“II est top, ce mec”. Celle qui parle, c’est Maïwenn à Cannes. Ce mec, c’est Alain Attal, businessman talentueux au flair cinéphile redoutable et producteur historique de Canet. Le point commun entre Polisse, Le Concert et Les Petits mouchoirs (i.e. des box office impressionnants), c’est lui et ses Productions du Trésor, l'une des écuries les plus fleurissantes du cinéma français. Que venait-il faire dans Radiostars ? Le film dégage ce qu’il a toujours avoué chercher à l’écran : “la sincérité absolue”.J’ai fait un rêveSi on observe le parcours de Radiostars, tous les voyants clignotent. Comme souvent, tout commence au congrès des exploitants (rassemblement où les distributeurs présentent leur films aux exploitants de salles) : la bande-annonce du film montrée en exclu aux professionnels a été plus que bien reçue. Bon signe puisque c’est là, un an avant, qu’avait démarré la success story d’Intouchables. Et puis le tam-tam s’amplifie vite. La promo commence doucement, portée par Manu Payet. Plus important encore, Radiostars remporte les prix principaux au festival de comédie de l’Alpe d’Huez. Ca n’a l’air de rien, mais c’est exactement ce qui s’était passé pour Tout ce qui brille. Enfin, les premiers retours des journalistes ciné sont dithyrambiques.Et si on tenait la comédie de l’année ? On n’est pas en train de vous promettre que Radiostars aura la carrière exceptionnelle d’Intouchables, mais on pourrait bien avoir déniché le nouveau Tout ce qui brille. Confirmation le 11 avril. Si on ne se trompe pas, ces Radiostars pourraient devenir des Moviestars.Par Pierre Lunn