Pulp Fiction Cannes 1994
Abaca

Il y a pile 25 ans, Quentin Tarantino triomphait sur la Croisette avec Pulp Fiction. Jean-Pierre Vincent, l’attaché de presse du film, se souvient.

Alors qu'il fait l'évènement en projettant Once Upon a Time in Hollywood ce mardi à Cannes, Quentin Tarantino n'a pas toujours été aussi révéré sur la Croisette. Outsider méconnu il y a 25 ans, le cinéaste réfléchissait même à ne pas assister à la soirée de clôture. Retour sur la folle aventure qui a mené au couronnement de Pulp Fiction en compagnie de Jean-Pierre Vincent, attaché de presse du film sensation de l'année 1994.

Dans la stratégique élaboration du calendrier des projections cannoises, le distributeur Jean Labadie obtient pour Pulp Fiction, en 1994, le jour porte-bonheur de Sailor et Lula [Palme 1990] et La Leçon de piano [Palme 1993] : le jeudi de la deuxième semaine. De bon augure pour la première visite en compétition du cinéaste américain, comme le raconte Jean-Pierre Vincent, attaché de presse du film et... de 11 autres Palmes d’or, de L’Homme de fer au Pianiste :

"Quentin débarque à Cannes dès le deuxième jour du festival. Il va voir deux à trois films par jour. Il nous assure vite que la Palme sera pour Rouge de Kieslowski." Pourtant, une fois Pulp Fiction projeté, on sent quelque chose dans l’air, symbolisé par l’affluence record lors de la conférence de presse. Face aux journalistes, toute l’équipe sauf... Bruce Willis.

Bruce tout-puissant

"J’avais pourtant briefé tout le monde la veille : à Cannes, l’heure c’est l’heure." Sauf que le matin, Bruce W. sèche les interviews prévues. "J’appelle l’hôtel du Cap où le concierge me répond qu’il a des instructions : aucun appel pour Bruce Willis et son publicist avant une heure tardive de la matinée. Je joins le chauffeur qui m’explique qu’il a fait la tournée des grands-ducs et n’est rentré qu’à 8 heures du matin."

Le publicist tente – en vain – de faire décaler la conférence de presse où son client débarque avec vingt minutes en retard. "Là, des sifflets se font entendre et Quentin lui jette un de ces regards noirs qui vous transforme en petit garçon."

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Mais le soir de la remise des prix, Bruce Willis est bien dans la salle... même s’il n’a pas voulu monter les marches avec une équipe qui apparaît très décontractée. "Après la projection, Quentin m’avait expliqué que pour ne pas gâcher son festival, il n’assisterait pas à la cérémonie de clôture sans la certitude que Pulp Fiction reçoive un prix. Je préviens donc Gilles Jacob [le délégué général du festival] qui m’assure qu’il m’appellera. Et le dimanche, il tient parole, ajoutant qu’il compte sur la présence de tous les acteurs. On en conclut donc qu’ils ont imaginé un prix d’interprétation global. On en est si convaincus que même voir Frances Fisher, la compagne d’Eastwood [le président du jury] sauter au cou de Quentin et lui dire qu’elle a adoré son film ne nous met pas la puce à l’oreille."

La cérémonie commence. Rien pour les comédiens. Rien pour la mise en scène. Pas de Grand Prix. "Là, j’entends Quentin dire : On s’est fait baiser ! Car il ne reste plus que Rouge et Pulp Fiction. Pour lui, c’est plié. Puis, Eastwood se lève pour annoncer la Palme. Il se tourne dans notre direction... qui est aussi celle de Kieslowski, placé derrière. Et quand il annonce Pulp Fiction, on saute tous comme des enfants. C’est une surprise absolue ! La soirée fut joyeuse. Et Bruce Willis, qui avait assuré vouloir rentrer à son hôtel, est resté avec nous jusqu’au bout de la nuit."

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