De Godard à de Funès : quand tout le cinéma français partait en vacances
UGC/Wild Bunch/Cady films/SNC
Les Vacances de Monsieur Hulot (1953)
Cady films
Plein soleil (1960)
Carlotta
Adieu Philippine (1962)
Théâtre du temple
Le Gendarme de Saint-Tropez (1964)
SNC
Pierrot le fou (1965)
SNC
Le Corniaud (1965)
Les Films Corona
Les Grandes vacances (1967)
Les Films Copernic
La Piscine (1969)
SNC
Le Genou de Claire (1970)
Les Films du Losange
De Godard à de Funès : quand tout le cinéma français partait en vacances
Les Vacances de Monsieur Hulot (1953)
Plein soleil (1960)
Adieu Philippine (1962)
Le Gendarme de Saint-Tropez (1964)
Pierrot le fou (1965)
Le Corniaud (1965)
Les Grandes vacances (1967)
La Piscine (1969)
Le Genou de Claire (1970)

Les Vacances de Monsieur Hulot (1953)

De Jacques Tati
Avec Jacques Tati, Louis Perrault, André Dubois...
C'est l'été, et les vacanciers viennent prendre le soleil sur les plages d'une petite station balnéaire de Loire-Atlantique. Parmi eux, le timide et gaffeur Hulot dont les maladresses ne passeront pas inaperçues.

Depuis 1936, les congés payés envoient les Français en nombre de plus en plus important prendre du repos et le soleil sur les plages. Une rupture du quotidien propice au farniente mais aussi à l'aventure, dont le cinéma se fait le témoin. En 1953, Tati documente ce phénomène de masse en inventant son personnage fétiche et annonce la couleur dès le titre : dans Les Vacances de Monsieur Hulot, c'est bien ce concept de congés, relativement neuf, et ses conséquences sur les êtres que le cinéaste met en scène.

Plein soleil (1960)

De René Clément
Avec Alain Delon, Maurice Ronet, Marie Laforêt...
Tom Ripley est chargé par un milliardaire américain de ramener aux Etats-Unis son fils Philippe qui passe de trop longue vacances en Italie avec sa maîtresse Marge. Mais Tom, envieux, tue Philippe et usurpe son identité.

Avec cette adaptation de Patricia Highsmith, René Clément fait du film de vacances un thriller écrasé par le soleil. Et met fin aux "trop longues vacances" du dilettante Greenleaf à coups de rebondissements en cascade.

Adieu Philippine (1962)

De Jacques Rozier
Avec Jean-Claude Aimini, Stefania Sabatini, Yveline Céry...
Deux amies se disputent les faveurs d'un machiniste de télévision se faisant passer pour un cinéaste. A l'approche de son départ pour l'Algérie et lassé par la compagnie des deux filles, il part en Corse. Où elles ne tardent pas à le rejoindre.

Rozier choisit de mettre les vacances, en forme d'échappée belle, au coeur de son premier long métrage, pour capter les personnages hors contexte, hors de leurs fonctions et occupations habituelles. Vacances redevient synonyme de suspension, de vide, de disponibilité pour qu'il arrive enfin quelque chose. Ou bien rien.

Le Gendarme de Saint-Tropez (1964)

De Jean Girault
Avec Louis de Funès, Michel Galabru, Jean Lefebvre...
Le maréchal des logis Cruchot est promu maréchal des logis-chef à Saint-Tropez. Il va organiser les chasses aux nudistes sur la plage, tandis que sa jeune fille Nicole s'incruste chez les fêtards de Saint Trop' en s'inventant un père milliardaire.

Il n'y a pas que la Qualité Française qui radiographie les vacances. A côté de son ressort comique typiquement defunèsien (qui joue avec son génie habituel un personnage coincé entre une autorité supérieure et des subordonnés incompétents), cette grande comédie populaire veut elle aussi un peu capter l'esprit jeunesse dorée des 60's dans la région PACA. Ca ne marche pas des masses de ce côté-là, mais ça reste en tête ("Do you do you Saint-Tropez ?"). Enorme succès, et premier film d'une série de six qui s'achèvera en 1982 avec le sinistre Le Gendarme et les gendarmettes. De Funès mourut l'année suivante.

Pierrot le fou (1965)

De Jean-Luc Godard
Avec Jean-Paul Belmondo, Anna Karina, Graziella Galvani...
Un jeune père de famille récemment au chômage s'enfuit avec la babysitter vers le Sud de la France, dans un grand périple mêlant trafic d'armes, complots politiques et pauses bucoliques.

Film de cavale plus que de vacances, Pierrot le fou n'en est pas moins une fuite, vers le bleu (de la mer), vers un peu de beauté "dans un monde d'abrutis" - quête du héros incarné par Belmondo -, une évasion du quotidien qui, toutes proportions gardées dans la mesure où celle-ci est semée d'intrigues criminelles, permet à la romance et au romanesque de s'épanouir. Le temps d'un été.

Le Corniaud (1965)

De Gérard Oury
Avec Louis de Funès, Bourvil, Venantino Venantini...
Un trafiquant utilise un honnête commerçant pour emmener de Naples à Bordeaux une Cadillac remplie d'héroïne.

Après Pierrot le fou, Le Corniaud illustre une certaine idée du road-trip à la française, version populo. Bourvil y incarne un archétype du vacancier un peu beauf, bob, bermuda et appareil photo en bandoulière, qui cherche des amours de vacances dans les campings de la cote. Et accessoirement doit échapper à toutes sortes de malfrats lancés à ses trousses.

Les Grandes vacances (1967)

De Jean Girault
Avec Louis de Funès, Claude Gensac, Maurice Risch...
Charles Bosquier envoie son cancre de fils passer les vacances d'été dans la famille d'un distillateur de whisky pour réviser son anglais. Mais son fiston se fait remplacer par un copain pour pouvoir explorer l'Angleterre à son gré. Son père part à sa recherche.

Quatrième film de Jean Girault avec le grand Louis, Les Grandes vacances scelle les noces de cinéma de de Funès et Claude Gensac, qui jouera en tout sept fois sa femme sur grand écran. Et après ? Reste une comédie où certains délires (le ravage de la distillerie) annonce les De Funès/Zidi dingos des 70's.

La Piscine (1969)

De Jacques Deray
Avec Alain Delon, Romy Schneider, Maurice Ronet, Jane Birkin...
Un couple idéal coule des jours heureux dans sa villa de Saint-Tropez jusqu'au jour où un ancien amant arrive au bras de sa fille, l'incendiaire Pénélope, et perturbe cette vie tranquille.

Ecrasé par le soleil du midi, le film mythique de Jacques Deray, malgré sa noirceur grandissante, a imprimé sur nos rétines l'image de la classe en vacances, le farniente avec style : Romy Schneider en bikini et les pauses lascives de Delon allongé au bord de la piscine sont inoubliables, et connues même de ceux qui n'ont pas vu le film. On n'a visiblement pas fait mieux jusqu'à aujourd'hui en termes d'oisiveté stylée puisque des grandes marques utilisent encore les images du film pour leurs campagnes publicitaires.

Le Genou de Claire (1970)

De Eric Rohmer
Avec Jean-Claude Brialy, Laurence de Monaghan, Fabrice Luchini...
Prêt à se marier, Jérôme passe ses dernière vacances de célibataire autour du lac d'Annecy. Il retrouve une amie écrivain qui lui propose d'être le sujet de son prochain roman : un homme mûr objet du désir d'une adolescente. Et voilà qu'arrive la jeune Claire qui va devenir l'obsession de Jérôme.

Cinquième des Contes moraux d'Eric Rohmer - entre La Collectionneuse et L'Amour l'après-midi- Le Genou de Claire est, au-delà de son look déjà désuet à sa sortie (Brialy qui s'est fait le look d'un frère Gibb), un marivaudage très 18ème siècle, une réflexion sur l'amour et la fiction, et un film en sandalettes où le canevas des vacances fournit le cadre de liberté où l'intrigue pourra s'épanouir. Et surtout l'occasion pour Luchini en second rôle de donner une perf délirante dont il a le secret.

Après Le Petit Nicolas le week-end dernier, c'est au tour de Ducobu de prendre des vacances à la télé.

"Je voulais évoquer l’insouciance des vacances des années 50 et 60", disait Laurent Tirard à propos des Vacances du petit Nicolas, rediffusé samedi dernier sur M6. Dans quelques heures, ce sera au tour de Ducobu de partir à la plage, sur TF1, cette fois : Les Vacances de Ducobu est programmé à 21h sur la première chaîne.


 

Mais de quoi parlait Laurent Tirard, exactement ? De cette époque bénie d’avant Les Bronzés et Max Pecas, d’avant Les Randonneurs et A nous les petites Anglaises. De ce moment historique et décisif où le plein emploi, le triomphe des congés payés, l’apparition du bikini et les débuts de la hype tropézienne vont fournir un fabuleux terrain de jeu au cinoche tricolore et contribuer à faire du "summer french movie" un genre à part entière. Un genre, vraiment ? La preuve que oui, c’est que personne n’en avait le copyright exclusif et que tout le monde cherchait à s’en approprier les codes : les Jeunes Turcs de la Nouvelle Vague ET les barons de la Qualité Française, Godard ET De Funès, Brigitte Bardot ET Monsieur Hulot. C’est vrai que c’était le bon temps... La preuve par 10.